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Remarques sur le transfert en hypnose
Le transfert n’est pas l’apanage exclusif de la situation analytique mais en concerne bien d’autres dès le moment où deux personnes sont en présence et entrent en relation pour s’intéresser à la parole de l’autre.
Freud soulignera ce point qui apparaît comme inhérent aux relations humaines. C’est d’ailleurs à l’intérieur même de la situation hypnotique, d’abord, qu’il en viendra à élucider le transfert. Il est bien évident que la question du transfert en hypnose se décline au minimum selon un transfert mais aussi un contre-transfert, pour parler en termes bien freudiens. L’autre question qui se pose à nous concerne précisément la ou les spécificités susceptibles de découler de l’hypnose.
Pour tenter d’être structuré, j’ai pensé qu’il serait opérant de faire une coupure à partir de la séance d’hypnose elle-même, c’est-à-dire entre le temps d’entretien et le temps inductionnel. Le temps dit d’entretien articule bien, comme en psychanalyse la donne binaire transfert/contre-transfert. Pour ce qui est du temps inductionnel, il y a peut être à réfléchir sur ce moment. D’autre part, il y a aussi une interrogation concernant le « transfert post-hypnotique » (Francine-Hélène Samak. Est-il identique aux termes transférentiels qui se sont noués initialement ou s’agit-il d’un transfert différent, notamment du fait du travail effectué à l’occasion de l’induction ? (Si oui, l’appellation transfert post-hypnotique devient effectivement très pertinente).
On pourra ajouter ici qu’il n’est pas forcément nécessaire qu’il y ait une induction hypnotique pour obtenir un effet de régression chez le sujet.
Y a-t-il alors un intérêt à faire un dédoublement entre transfert et transfert inductionnel ?
De manière générale, Lacan situe le transfert comme étant une résultante de la fermeture de l’inconscient, en ce sens où le transfert ne peut qu’émerger seulement à travers la répétition, ce moment où le sujet est le plus soumis à la barre de division et par lequel il vient effectuer cette « mise en acte de la réalité de l’inconscient », c’est-à-dire de la réalité sexuelle. (Les quatre concepts…). Ce qui veut dire que le transfert est essentiellement « résistant » comme le souligne encore Lacan. « Le transfert est, dit Lacan, à la fois un obstacle à la remémoration, et présentification de la fermeture de l’inconscient, qui est le manque, toujours à point nommé, de la bonne rencontre ».
Mais dans cette suite, serait-il opportun d’aller plus loin en disant que ce qu’il y a de remarquable dans l’hypnose, et particulièrement au sein de l’induction, c’est le don de parole que fait l’hypnothérapeute au patient et auquel ce dernier fait un accueil un traitement particulier grâce à la force du transfert patient-thérapeute. A partir de cette remarque pourrions-nous poser l’hypothèse qu’il y a un vrai dédoublement au sens où finalement au moment de l’induction, -et pour reprendre des termes de Lacan lorsqu’il parlera du transfert en se servant des positions de l’aimant et de l’aimé-, alors l’aimant ou l’amant comme l’on voudra n’est plus le patient mais le thérapeute, situation inverse au transfert habituel. En effet, pour que ce don soit possible, de paroles (certainement pas n’importe lesquelles non plus même si c’est une « déparole » comme dit Roustang, il faut bien que le thérapeute convoque son propre transfert, ses propres sensations, affects et représentations qu’il possède à l’endroit de son patient, et, d’autre part, que ce dernier accepte ce don qui est manifestement du côté de l’empathie si l’on me permet ce terme imprécis. Pour autant si l’on garde ce terme « amour » dont Freud complétait le signifiant « transfert » (« amour de transfert »), on peut alors éclairer la question du transfert en hypnose avec la théorie freudienne, c’est-à-dire avec une grille de lecture psychanalytique.
En d’autres termes, cela rejoint ce que Lacan dénonce à propos de l’amour et qui peut se formuler comme : « Je t’aime parce que tu te laisses aimer », le transfert du thérapeute serait suffisamment positif à l’égard son patient pour lui faire don de ses mots et, le thérapisant, à travers la force transférentielle déployée par le biais de sa demande à l’égard du thérapeute pourrait concéder à faire quelque chose de ce don-parole. Je pense qu’à la différence du positionnement analytique, il y a une vraie mobilisation du positionnement de l’aimant chez l’hypnothérapeute au moment de l’induction en même temps que s’effectue le positionnement classique du transfert tel qu’on le retrouve chez l’analysant vis-à-vis de l’analyste. D’ailleurs Lacan ne parlait-il pas au sujet de la psychanalyse qu’elle serait « une hypnose à l’envers » ?